À propos de l'adaptation de
Jean-Daniel Verhaeghe (2006)

  • Le grand mou...
    Critique de Frédérick Lanoy parue sur www.lequotidienducinema.com le 9 octobre 2006

    Si vos enfants n'ont pas été sages, vous pouvez désormais les punir en allant au cinéma découvrir cette nouvelle adaptation sur pellicule d'un classique de la littérature française qui a fait souffrir des générations d'écoliers. Blague à part, Le grand Meaulnes version 2006 reprend vaguement la trame du roman avec l'ambition d'en moderniser certains aspects (l'action se situe en 1910-1914 au lieu de 1870). A une transposition extrêmement fidèle de l'œuvre d'Alain Fournier, Jean-Daniel Verhaeghe et son scénariste Jean Cosmos ont donc préféré une adaptation libre ce qui constitue à première vue une bonne nouvelle. A première vue seulement…

    Ah ! Le grand Meaulnes ! Chef d'œuvre officiel qui hante les programmes du collège depuis maintenant quelques décennies… Deux ans après Vipère au poing, voilà donc une nouvelle transposition sur grand écran d'un " classique " qui sent bon la poussière de bibliothèque. Mais attention, les petits malins qui verront dans le film de Jean-Daniel Verhaeghe un espoir de ne pas lire le roman pour leur futur exposé de français doivent se méfier : la fin est totalement différente et certains personnages ont tout simplement disparu. Malheureusement, cela ne rend pas plus digeste ce très long métrage sclérosé dans un académisme pompeux.

    La première grande faiblesse de ce grand Meaulnes 2006 réside dans des erreurs de casting monumentales : Nicolas Duvauchelle, trop vieux pour le rôle, livre une interprétation catastrophique. En dépit des efforts de l'ingénieur du son, ses dialogues murmurés restent inaudibles tandis que son mutisme supposé mystérieux et charismatique le rend rapidement insupportable. Face à lui, Jean Baptiste Meaunier confirme son statut d'acteur " tête à claque " avec brio même si ce dernier a plus de circonstances atténuantes son rôle étant assez ingrat et sa présence à l'écran beaucoup moins longue. On ne peut d'ailleurs s'empêcher d'avoir un semblant de sympathie pour son interprétation dans ces scènes terribles où une équipe technique cruelle lui a greffé une moustache en plastique afin de montrer le temps qui passe… C'est absolument catastrophique (on n'y croit pas une minute) et plutôt drôle. Effet comique involontaire garanti.

    Côté féminin, le tableau est un peu plus reluisant même si Emilie Dequenne ne fait que passer en coup de vent et que Clémence Poésy papillonne sans se fatiguer. Le paisible sommeil du spectateur ne sera guère troublé par la réalisation toute télé filmique de Jean Daniel Verhaeghe. En 1.85 avec une caméra aussi dynamique que la super 16 de Derrick, on se croirait devant le petit écran et on y est presque. Enfin à 8 ou 10 € la place, Le grand Meaulnes n'est assurément pas le meilleur investissement cinématographique de la semaine.

    Totalement dénué de magie ou de poésie, ce n'est qu'une succession particulièrement ennuyeuse de cartes postales vieillottes et sans âme en dépit d'un final, plutôt intéressant sur le papier, mais totalement dénué d'émotion à l'écran.