La rue aux trois poussins
Nouvelle

  • Rédaction
    Fontenay-le-Comte (Vendée, France), en 1941 [ ? ].


  • Manuscrit
    [ ? ].


  • Publication d'une préoriginale
    Dans l'hebdomadaire « Gringoire », n° 657 du 11 juillet 1941 ; p. 6.







    La rue aux trois poussins, 1941.
    Publication en préoriginale.



  • Edition originale
    In La rue aux trois poussins (Paris, Presses de la Cité, 1963).


  • Réédition(s) en français

    [En préparation].


  • Edition(s) collective(s) en français
    Liste non exhaustive

    In Œuvres complètes (Lausanne, Editions Rencontre, 1967-1973) - tome 26.
    In Tout Simenon (Paris, Presses de la Cité, 1988-1993) - tome 12.
    In Tout Simenon (Paris, Omnibus, 2002-2004) - tome 12.


  • Traduction(s)
    Liste non exhaustive

    En allemand :
    [ ? ] : [ ? ].

    En anglais :
    [ ? ] : [ ? ] (première édition américaine).
    [ ? ] : [ ? ] (première édition anglaise).

    En italien :
    [ ? ] : [ ? ].


  • Intrigue
    La rue Pasteur (dans une ville non nommée ; il pourrait s'agir de Liège, Belgique [ ? ]) a cent mètres de long. C'est une rue neuve, spacieuse, aux maisons de brique rose, aux trottoirs larges et réguliers. Au bout, on voit les ombrages de la place du Congrès. A l'autre bout, la rue de la Loi.

    Trois gamins — Albert, René et Bilot (qui s'appelle Charles, comme son père, mais qu'on a toujours surnommé Bilot) — jouent sur le trottoir ; ils n'ont pas encore l'âge d'aller à l'école. Comme trois poussins, ils grattent la terre entre les pavés. Ils ont entrepris un chantier gigantesque, et creusent un réseau compliqué de canaux. Ils guident l'eau déversée un quart d'heure plus tôt par Mme Romond, une grosse femme toujours en négligé, qui vient de laver son seuil de deux marches et sa portion de trottoir.

    Survient un grand qui a un pied bot, Cendron. Il a quinze ans, mais les gamins le prennent pour un homme. Sans doute à cause de son air mystérieux : il sait des choses, mais ne les dévoile qu'à moitié. Il ne va pas à l'école, mais ne travaille pas non plus. Cendron prétend qu'il est de la secrète, qu'il surveille les gens. N'est-il pas d'ailleurs au courant de ce que fait le père du petit Bilot ? Et mieux que Bilot lui-même, qui croit que son père travaille chez Ducatel, rue Saint-Léonard, alors que Cendron — pas plus tard qu'hier — l'a vu sortir à six heures et quart de la maison à loggia de la rue de la Liberté !

    Or, dans cette maison, vit une femme qu'on voit toujours en déshabillé bleu ciel. On chuchote qu'elle est entretenue par un avocat du quartier. On prétend aussi qu'elle reçoit d'autres hommes.

    Le soir, pendant le repas, Bilot rapporte innocemment à ses parents les propos de Cendron - un menteur, dit-il - qui affirme avoir vu son père sortir de la maison à loggia. Il l'a reconnu grâce à sa moustache acajou. La cassure est instantanée et irréversible : Hélène soupçonne ; Charles explique. Ou plutôt, voudrait s'expliquer… Mais c'est peine perdue ! Sa femme ne veut rien entendre, offusquée qu'après six ans de mariage, il ait osé aller trouver cette femme qui reçoit n'importe quel homme, qui est peut-être malade…

    Hélène prend l'habitude de renifler sans raison et d'avoir les yeux rouges. Les repas sont silencieux. Les Bastien mènent désormais une existence empoisonnée par les révélations de Cendron : elle, méfiante et hostile jusqu'à en devenir odieuse ; lui, résigné, amoindri, jusqu'à en perdre la joie de vivre. Le couple déménage et s'installe dans un autre quartier, à deux pas de l'entreprise Ducatel.

    Jamais plus Bilot ne jouera accroupi comme un poussin sur le trottoir. D'ailleurs, on va le mettre à l'école.

    Bilot grandit. A dix-sept ans, il porte toujours son surnom. Un soir, il se laisse entraîner par des amis dans un café où il y a des femmes. Ils paient des tournées. Pas toutes, car Bilot doit laisser sa montre en gage.

    Le lendemain, il va attendre son père à la sortie du bureau et lui explique la situation : il a besoin de cent-cinquante francs. Son père les lui donne et lui recommande : Surtout, ne dit rien à ta mère… Elle ne comprendrait pas… Chemin faisant, il lui révèle comment, jadis, il pénétra rien qu'un moment, dans la maison à loggia de la rue de la Liberté — où il passait par hasard pour la première fois — pour un service qu'il a rendu à la femme en peignoir bleu et qui, pour le remercier, lui avait offert un verre de liqueur… Une vie gâchée par un affreux malentendu.

    Ils arrivent maintenant chez eux. Charles Bastien glisse à son fils :
    — Ta pauvre mère mourra sans comprendre…

    A la fenêtre, le rideau a bougé. Alors, furtivement, il ajoute :
    — Si tu es encore embarrassé, viens me voir au bureau...

    Le couvert est déjà dressé. Hélène remplit la soupière :
    — Quels mauvais conseils étais-tu en train de donner à ton fils ?




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