Intrigue
            C'est sans plaisir que Maigret reçoit, à son bureau 
            du Quai des Orfèvres (Paris, France), Léon Florentin, 
            un ancien condisciple au lycée Banville, à Moulins, 
            qu'il n'a jamais particulièrement estimé et qu'il avait 
            perdu de vue depuis longtemps.
            
            Celui qui passait pour le rigolo de la classe a perdu de sa jactance. 
            Ce d'autant que l'affaire qu'il apporte à Maigret n'est pas 
            tout à son honneur. En effet, il vient annoncer au commissaire 
            l'assassinat  en plein jour et d'un coup de revolver  
            de Joséphine Papet, la maîtresse dont il était 
            l'amant de cur. Bien qu'il se trouvât dans l'appartement 
            à ce moment, il prétend n'avoir rien vu, caché 
            qu'il était dans la penderie
 et, bien entendu, se défend 
            d'y être pour quelque chose.
            
            C'est que Léon Florentin n'est pas le seul homme dans la vie 
            de la victime. Joséphine Papet (trente-quatre ans), dite Josée, 
            est une coquette petite bourgeoise calme et sans histoires. Elle est 
            entretenue par les libéralités de trois messieurs d'âge 
            mûr  des hommes d'affaires aisés et respectables 
             qui viennent régulièrement la trouver chez elle, 
            chacun ignorant l'existence de l'autre.
            
            Il existe même un cinquième homme  que Maigret 
            surnommera le Rouquin  que Josée reçoit gratis 
            au nom de sa jeune fougue.
            
            Entre le moment où Joséphine Papet a été 
            abattue et la visite de Léon Florentin à la P. J., soixante 
            minutes se sont écoulées. Une heure pendant laquelle 
            Maigret cherche à savoir ce qui s'est passé. En faisant 
            suivre Florentin  un bricoleur qui se prétend antiquaire 
             jusqu'à son logis et atelier du boulevard Rochechouart, 
            le commissaire parvient à mettre la main sur une cassette contenant 
            48'000 francs. Il s'agit des économies de Josée, que 
            Florentin avait d'abord dissimulées chez lui avant de se rendre 
            au Quai des Orfèvres.
            
            Se sentant suspecté par la police, Florentin se jette dans 
            la Seine comme pour se suicider. Le sachant aussi bon nageur que comédien, 
            Maigret ne croit pas à la thèse du geste désespéré. 
            Il devine que son ancien compagnon de classe est un homme en permanence 
            désargenté et que c'est Josée qui l'entretenait. 
            Aussi se doute-t-il que lui, Florentin, devait connaître les 
            autres 
amis de sa maîtresse et qu'il a peut-être 
            cherché à les faire chanter. Car s'il éprouve 
            du mépris pour Florentin, Maigret ne croit pas qu'il soit le 
            meurtrier. Un raté et un menteur, certainement ; mais pas un 
            homme capable de tirer de sang froid sur quelqu'un.
            
            L'après-midi du crime, personne n'est monté chez Josée. 
            Madame Blanc, la concierge de l'immeuble est formelle sur ce point. 
            Comme les interrogatoires des 
amis de Josée n'ont donné 
            aucun résultat, Maigret les confronte à Florentin.
            
            Trois d'entre eux avouent avoir occasionnellement écrit à 
            leur maîtresse. Or, leurs lettres n'ont pas été 
            retrouvées dans les papiers de Josée. Maigret apprend 
            aussi que, refusant de se laisser exploiter plus longtemps, Joséphine 
            Papet était sur le point d'abandonner Florentin, dont elle 
            s'était lassée.
            
            Toujours sans le sou, Florentin n'aurait-il pas emporté aussi 
            les lettres des amants de Josée, dans le but de faire chanter 
            ses rivaux ? Puis, se sentant coincé par la police, n'aurait-il 
            pas simulé la noyade pour les faire disparaître dans 
            la Seine ?
            
            Un à un, et par recoupements, le commissaire va débrouiller 
            les fils d'une affaire où la respectabilité dissimule 
            la médiocrité, voire le sordide.
            
            Un homme finit par passer aux aveux. Victor Lamotte, négociant 
            en vins à Bordeaux, reconnaît avoir été 
            victime d'un chantage de la part de Florentin. Il était dans 
            l'appartement de Josée le jour du drame. Ayant refusé 
            de récupérer sa correspondance contre les 50'000 francs 
            que lui réclamait Florentin, il l'a menacé avec un revolver. 
            Entre un homme au comble de la fureur et un autre presque mort de 
            peur : Josée. Elle tente de s'interposer entre ses deux amants. 
            Et c'est derrière elle que Florentin cherche à se cacher
 
            et c'est elle qui est atteinte lorsque le coup de feu claque, par 
            inadvertance.
            
            Il y avait donc bien deux hommes dans l'appartement de Josée 
            au moment où elle a été tuée. La concierge, 
            l'énorme Madame Blanc, a donc menti. Chez elle, les hommes 
            de Maigret retrouveront 2'200 francs. Le prix de son silence. Mais 
            elle n'entendait pas en rester là et n'avait pu résister 
            au désir d'exercer son propre chantage sur l'homme qu'elle 
            avait vu monter chez Josée et en redescendre, à l'heure 
            du crime.
            
            Maigret estime qu'un bon avocat évitera à Victor Lamotte 
            une peine trop lourde, sans pour autant faire payer Léon Florentin, 
            le vrai responsable de la mort de Josée.
            
            Un Florentin qui n'échappera pas totalement à la justice, 
            puisqu'il fera l'objet d'un mandat d'arrêt pour tentative de 
            chantage.