Les ridicules !
Essai satirique

  • Pseudonyme
    Georges Sim.
    Liste des ouvrages publiés sous le même pseudonyme.


  • Rédaction
    Liège (Belgique), en novembre [ ? ] 1921.


  • Manuscrit
    [ ? ].


  • Publication d'une préoriginale
    Aucune.


  • Edition originale
    Achevé d'imprimer : pas d'achevé d'imprimer [24-25 novembre 1921].
    Sans lieu [Liège], ni de mention d'imprimeur [Imprimerie de la « Gazette de Liège »] ; (format ?), 24 pages.

    Plaquette hors commerce tirée par l'auteur lui-même et réservée sans doute à ses seules victimes, puisqu'il s'agit d'une galerie de portraits plutôt acides de quelques-uns de ses amis peintres de La Caque.
    Le tirage est vraisemblablement de 6 exemplaires (les premières bibliographies de l'œuvre de Simenon en signalent 12).
    Pas de grands papiers, ni de tirage numéroté.


  • Réédition(s) / Edition(s) collective(s) en français


     
    Les Ridicules, 1991.
    Réédition (Presses de la Cité).
    Sur la couverture de cette réédition, le titre Les Ridicules a perdu le point d'exclamation qu'il porte sur la plaquette originale.


     
    Les Ridicules, 1991.
    Réédition (Presses de la Cité).
    Sur la couverture de cette réédition, le titre Les Ridicules a perdu le point d'excla-mation qu'il porte sur la plaquette origi-nale.


  • Remarque(s)
    L'essai porte un sous-titre : portraits.

    Les Ridicules ! est la troisième tentative littéraire de Simenon (par opposition à ses écrits journalistiques et à ses contes galants), après Au pont des Arches et Jehan Pinaguet, mais la seconde à sortir de presse. L'expression prend ici toute sa saveur puisque c'est l'auteur lui-même qui compose ce fascicule à la main à la « Gazette de Liège » et l'imprime sur du très beau papier à la presse à bois. Dans Point-virgule (1979), Simenon dit en avoir donné un à chacune de [ses] victimes, c'est-à-dire dix ou douze en tout. Cinquante-huit ans après, en citant de mémoire un texte dont il ne possède plus un seul exemplaire, Simenon se trompe. Ses victimes ne sont en effet que quatre et le tirage n'a pas dû excéder six exemplaires, l'un d'eux étant réservé à Régine Renchon, sa fiancée et future première épouse. La plaquette porte d'ailleurs une dédicace imprimée : A ma Régine, pour ses étrennes. Le texte est suivi de l'indication 24-25 novembre 1921. La plaquette a très certainement été tirée à ces dates, l'auteur devant effectuer son service militaire en Allemagne dès le début du mois suivant.

    Vu son tirage confidentiel et les moyens utilisés pour la produire, la plaquette n'a pas été commercialisée. Elle a d'ailleurs vu le jour dans de mauvaises circonstances, soit peu avant le décès brutal et prématuré du père de Simenon.

    On peut mesurer la réaction des victimes impliquées dans Les ridicules ! par le fait que leurs ayants droit ou parents n'ont jamais trouvé trace de cette curiosité bibliophilique dans leur héritage. Il semblerait d'ailleurs que le seul exemplaire à avoir survécu soit celui de Régine Renchon, aujourd'hui conservé par le Fonds Simenon de l'Université de Liège (Belgique).

    En 1975, lorsque Simenon autorise Francis Lacassin à rééditer aux Editions d'Aujourd'hui son premier roman Au pont des Arches, il s'émerveille du résultat obtenu et de la possibilité de faire revivre les livres morts ou perdus. Il suggère alors lui-même la publication de Jehan Pinaguet, son deuxième roman, achevé le 6 avril 1921 et resté inédit jusque-là. Celui-ci n'existant que sous forme dactylographiée, le projet est abandonné. Simenon propose alors de rééditer Les ridicules ! en fac-similé (comme ce fut le cas pour Au pont des Arches). Mais il s'avère que le seul exemplaire existant appartient à sa première femme et Simenon ne souhaite pas le lui emprunter en raison de l'ancien contexte affectif dans lequel cette plaquette est née. Le projet est lui aussi abandonné.

    Il faudra attendre quinze ans pour que s'accomplisse la résurrection de ces trois textes arrachés au passé. En effet, en 1991, les Presses de la Cité rééditent en un volume Au pont des Arches et Les ridicules, auxquels est ajouté Jehan Pinaguet. Chacun de ces trois textes écrits par Simenon entre 1920 et 1921 apporte sa révélation pour retracer la genèse du talent de l'auteur.


  • Sujet
    Ce petit brûlot a pour cadre l'atelier de Régine Renchon, dans lequel quatre peintres de La Caque tiennent réunion. L'auteur les écoute et les regarde se pavaner. Il explique pourquoi deux d'entre eux ne se rencontrent jamais l'un sans l'autre : car le futur académicien qui a déjà la superbe de sa gloire à venir n'est rien, pas même académicien, sans le naïf éphèbe, et celui-ci, de son côté, ne pourrait vivre vingt-quatre heures sans l'aide de son ami. […] Parce que mes deux lascars ne parviennent à constituer un homme qu'en mettant ensemble leurs facultés à tous deux.

    Un autre dont la femme vient d'accoucher serait un brave garçon sans ridicule s'il ne s'était mis en tête de jouer son petit bourru, son rustre. Parce qu'il veut paraître une brute indomptée il n'est plus en réalité qu'un pantin falot dont les gestes n'ont aucun sens. […] Pourquoi faut-il que son cœur ne contienne le moindre instinct farouche ; pourquoi les dieux, ironisant sans doute, bourrèrent-ils cette peau de lion de molle timidité ?

    Il reproche à un autre : pourquoi faut-il que ces pensées que tu exprimes avec tant de chaleur, et qui te valent une petite cour d'aspirants artistes, pourquoi faut-il que ces pensées, ce soit aux autres que tu les voles ?… Cinq minutes te suffisent pour dévaliser un ami de tout ce qu'il a dans la cervelle ; et cinq autres minutes ne te sont même pas nécessaires pour trouver un auditeur auprès duquel tu liquideras ton larcin. A force de te gaver de l'esprit des autres, le tien souffre d'indigestion, et périodiquement, c'est au vin qu'il incombe de le purger.

    Et ainsi de suite pendant vingt-quatre pages…

    L'auteur n'a guère ménagé ses amis. Aucun n'est nommé, mais ils sont décrits avec une férocité si précise qu'ils ne pouvaient avoir de doute quant aux dégâts infligés à leur amour propre. Simenon reconnaît : j'ai fait un portrait assez acide de mes amis et de moi-même, et je ne m'épargnais pas puisque, dans la dernière page, je disais que le plus ridicule de tous était moi. Le plus étrange est que le coupable se soit étonné de l'accueil peu amical réservé par les victimes à ses gracieusetés…



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