Le grand Meaulnes
Résumé de l'œuvre
Adaptations cinématographiques


 
Il arriva chez nous un dimanche de novembre 189...
Je continue à dire « chez nous », bien que la maison ne nous appartienne plus. Nous avons quitté le pays depuis bientôt quinze ans et nous n'y reviendrons certainement jamais.


 
Ainsi commence Le grand Meaulnes, un roman autobiographique et de fiction poétique, empreint d'une nostalgie qui ressuscite les rêves de l'adolescence et traduit la quête d'un amour impossible.

Selon un sondage réalisé par le CSA en novembre 1999 pour « Le Parisien-Aujourd'hui », Le grand Meaulnes fait partie des dix œuvres littéraires qui ont marqué le XXe siècle.

Les quatre romans arrivés en tête de ce sondage sont : Le petit prince d'Antoine de Saint-Exupéry, Le vieil homme et la mer d'Ernest Hemingway, Le grand Meaulnes d'Alain-Fournier et L’étranger d'Albert Camus.


Résumé de l'œuvre

 
Par Jacques Rivière

Au cours d'une conférence prononcée à Genève le 15 février 1918, sous le titre « Un roman d'aventure : Le grand Meaulnes d'Alain-Fournier », Jacques Rivière présente ainsi le roman de son beau-frère publié cinq ans plus tôt dans cinq numéros successifs de la NRF, puis chez Émile-Paul


 
« ... j'ai parlé jusqu'ici comme si vous aviez tous lu ce livre.

Bien que le succès en ait été grand, on est encore fort excusable aujourd'hui de ne pas le connaître. On le serait moins de ne pas le lire après en avoir entendu parler. Pour vous rendre la chose tout à fait impossible, je voudrais vous en résumer la donnée et vous en faire comme goûter le parfum à l'aide de quelques lectures.

La scène se passe dans le petit village de Sainte-Agathe dans le Berry. Les parents de François Seurel y sont instituteurs ; son père dirige même un Cours Supérieur où l'on prépare l'École Normale. François est un enfant maladif et d'humeur un peu solitaire. Mais la vie est brusquement changée par l'arrivée au Cours d'un grand élève, entreprenant et résolu, peu bavard mais plein de goût pour l'action et pour l'aventure. C'est le grand Meaulnes. François se lie presque tout de suite d'amitié avec lui. Le village est assez éloigné du chemin de fer. Aux environs de Noël, François est chargé par son père d'aller chercher à la plus prochaine gare dans une voiture à âne ses grands-parents qui viennent passer quelques jours à Sainte-Agathe. Cependant le grand Meaulnes apprend par hasard qu'on pourrait gagner du temps en allant avec la carriole d'un fermier voisin jusqu'à Vierzon où le train arrive bien plus tôt. Sans rien dire à personne, il se décide à tenter l'entreprise...

C'est ici que commence l'aventure. De Meaulnes on ne sait plus rien pendant trois jours. La voiture dans laquelle il est parti a été ramenée par un paysan qui l'a trouvée vide et errante au gré de son cheval. Meaulnes rentre enfin au bout de trois jours, harassé, fripé, sali, farouche ; il ne répond à aucune question.
Cependant Seurel finit par lui arracher son secret. Meaulnes s'est endormi dans la voiture et s'est perdu. Après une nuit passée dans une bergerie abandonnée et une journée où il a marché à travers champs sans rencontrer personne, il est arrivé dans un domaine à demi-ruiné, où se donnait juste à ce moment une fête étrange. Les enfants y faisaient la loi ; dans l'attente des fiancés en l'honneur de qui elle se donnait, ils avaient organisé mille jeux pleins de fantaisie et toute une mascarade démodée. Dans la chambre où il s'était glissé par la fenêtre pour dormir, Meaulnes a trouvé tout ce qu'il lui fallait pour se déguiser en jeune élégant de 1830. Sous ce costume il a pu se mêler à la fête et, au cours d'une promenade en bateau sur l'étang, il a rencontré une jeune fille merveilleusement belle dont il s'est épris. Il a pu échanger quelques mots avec elle. Mais comme si le charme en avait été mystérieusement rompu, voici que la fête tout à coup s'est débandée. Les fiancés n'arrivant pas, les invités, pris d'une sorte de panique ont commencé à s'en aller. Le hasard met Meaulnes brusquement en présence d'un jeune homme. C'est le fiancé ; il est rentré en cachette tout seul, la jeune fille qu'il aimait n'ayant pas voulu croire en lui ni le suivre vers cette fête qu'elle a prétendue impossible. Il ne fait que passer par le domaine ; Meaulnes seul l'y aura revu, car il s'enfuit. Devant cette débâcle, il ne reste à Meaulnes qu'à partir lui aussi. Une voiture le ramène à travers la nuit jusqu'aux environs de Sainte-Agathe. Mais comme il s'y est endormi de fatigue, quand elle le dépose, il ne sait pas plus qu'à l'aller par quel chemin il a passé.

Désormais tout l'intérêt du roman va consister dans la recherche de ce chemin perdu. Meaulnes et Seurel, unis par leur secret, mettent en oeuvre toute leur ingéniosité pour le retrouver. Un instant la fortune semble vouloir les favoriser et leur rendre la piste. Des bohémiens sont venus à Sainte-Agathe. L'un d'eux est un étrange garçon qui révolutionne tout le bourg. Il organise avec l'aide des gamins du pays contre Meaulnes et François une sorte de guerre. Un soir avec sa troupe il donne à la maison d'école un simulacre d'assaut que la venue d'un paysan le force d'interrompre. Mais François et Meaulnes sortis pour poursuivre les assaillants tombent dans une embuscade.

La paix ne tarde pas à se faire entre Meaulnes et le bohémien. C'est qu'il y a entre eux des liens secrets qu'ils découvrent. Le bohémien a été lui aussi dans le domaine merveilleux et il donne à son nouvel ami quelques indications — d'ailleurs encore insuffisantes — sur la route qui y conduit. Meaulnes pourtant ne le reconnaît que trop tard, qu'au moment où sans en rien dire à personne, il s'apprête à s'enfuir. C'était Frantz de Galais, le jeune fiancé de la fête, avec qui Meaulnes s'était rencontré le soir de la débandade. Hélas ! il a décampé trop tôt ; Meaulnes n'aura appris de lui que l'adresse à Paris de la jeune fille dont il est amoureux.

Muni de ce seul renseignement, Meaulnes laisse François et part pour Paris. Mais à l'adresse indiquée il n'y a personne : la maison est vide. Meaulnes reste dans la grande ville, oisif et désespéré, à la merci de toutes les tentations. Et c'est François que le hasard, longtemps après, met tout à coup sur la piste du domaine merveilleux. Il le retrouve sans aucune difficulté ; la jeune fille y est toujours ; il la voit ; il comprend qu'elle n'a cessé de penser à Meaulnes. Le rêve de toute leur adolescence se résout ainsi en éléments tout ordinaires, tout prochains, tout faciles à saisir.

Il semble qu'il n'y ait plus qu'à aller chercher Meaulnes et que l'aventure soit finie. Mais Meaulnes, que Seurel en effet ramène, est étrangement nerveux et rebelle ; il manque même de détruire par son humeur inexplicable le bonheur que son ami lui a préparé et qu'il n'a plus qu'à cueillir. Pourtant il se marie, son coeur sauvage semble dompté.

Hélas ! la chimère veille, l'esprit d'aventure et de rêve le guettent encore. Pendant le séjour de Frantz à Sainte-Agathe, au moment où leur amitié se nouait, lui et Meaulnes se sont mutuellement et solennellement juré d'accourir au premier appel l'un de l'autre. Le soir des noces de Meaulnes et d'Yvonne de Galais, du bois qui borde la maison, retentit l'appel de Frantz...

Ils rentrent mais le lendemain, Meaulnes, avec le consentement de sa femme, repart. C'est qu'à l'insu de François et d'ailleurs aussi d'Yvonne, sa dette envers Frantz s'est alourdie. Pendant son séjour à Paris, il lui a pris, sans savoir que c'était elle, sa fiancée, celle-là-même qui avait manqué au rendez-vous des noces et de la fête étrange. Et maintenant il faut qu'il répare sa faute, il faut qu'il la retrouve à tout prix, qu'il l'empêche de se perdre complètement. Voilà le secret de sa fuite.

C'est François qui le découvre en ouvrant par hasard un cahier qui est le journal de Meaulnes pendant son séjour à Paris. Mais hélas ! dans l'intervalle les événements ont marché. La jeune femme que Meaulnes a quittée est devenue mère ; mais dans des conditions si difficiles qu'elle en est morte. Meaulnes en ramenant bien plus tard Frantz et sa fiancée, ne retrouvera plus que sa petite fille que François lui a gardée et qu'il a élevée pour lui. »


Adaptations cinématographiques

 
A mon sens, le premier devoir du cinéaste envers ce livre [est] la fidélité absolue, la soumission totale. Ainsi il n'y a pas une seule phrase [ni un seul] dialogue inventé [qui puisse être acceptés, pas plus que la moindre [des] transformations. [Même] la plus anodine suffit à fausser irrémédialement l'un ou l'autre des personnages et le sens profond de l'œuvre tout entière.

Isabelle Rivière
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1967 — Jean-Gabriel Albicocco

 
Réalisation : Jean-Gabriel Albicocco
Scénario : Isabelle Rivière et Jean-Gabriel Albicocco
Avec : Jean Blaise (Augustin Meaulnes), Brigitte Fossey (Yvonne de Galais), Alain Libolt (François Seurel), Alain Noury (Frantz de Galais)...
Sortie : [ ? ] 1967


Le grand Meaulnes, 1967
Dossier de presse du film


 
Adapter Le grand Meaulnes au grand écran est une aventure qui a tenté plus d'un réalisateur. Isabelle Rivière — la sœur de l'auteur — s'est montré réticente à une telle entreprise, voulant à tout prix en préserver l'esprit et la féérie qui s'en dégage.

Elle se décide finalement à porter elle-même Le grand Meaulnes au cinéma et, pour conduire le projet, accorde sa confiance au jeune réalisateur, Jean-Gabriel Albicocco.

Ce sont Jean Blaise et Brigitte Fossey qui interprétent les rôles de Meaulnes et d'Yvonne de Galais. Le film sort en 1966 et divise la critique. Aujourd'hui encore, la question demeure posée : Le grand Meaulnes est-il vraiment soluble au cinéma ? Il est permis d'en douter.



Le grand Meaulnes, 1967
Affiches françaises (Daniel Louradour) ; 57 x 76 cm et (Mascii) ; 120 x 160 cm



 
Jean-Gabriel Albicocco
Né le 15 février 1936 à Cannes (France), mort le 9 avril 2001 à Rio de Janeiro (Brésil)

Fils du chef opérateur italien Quinto Albicocco, Jean-Gabriel reçoit sa première caméra à dix ans. Après avoir été assistant de Jules Dassin sur Celui qui doit mourir (1956).

Jean-Gabriel Albicocco fait partie des nombreux réalisateurs qui commencent à tourner en (et autour de) 1960, dans la foulée de la nouvelle vague. Son goût le porte vers les adaptations littéraires raffinées dès son premier long métrage, La fille aux yeux d'or, d'après Balzac, où joue Marie Laforêt, qu'il épouse en cette même année 1960. En 1962, Le rat d'Amérique, d'après Jacques Lanzmann, passe quelque peu inaperçu, mais le public revient en 1966 pour Le grand Meaulnes, accordant au film — et à la comédienne Brigitte Fossey, qui trouve dans le personnage d'Yvone de Galais son premier grand rôle de jeune adulte — le succès qu'il avait pu porter en son temps au livre d'Alain-Fournier. Le soin accordé à l'image, qui deviendra pour les détracteurs une préciosité confinant au maniérisme à la David Hamilton, enchante les uns, repousse les autres. Suivront Le cœur fou, avec Michel Auclair en 1969, et Le petit matin, avec Matthieu Carrière et Jean Vilar, d'après le roman de Christine de Rivoyre sur l'occupation allemande, en 1970.

Fondateur de la Société des réalisateurs de films (SRF) et de la Quinzaine des réalisateurs, une des sélections parallèles du Festival de Cannes, Jean-Gabriel Albicocco passe les dernières de sa vie au Brésil, où il est salué par ses pairs comme le promoteur de la cinématographie française au Brésil, opérateur actif et infatigable des liens entre les cinémas français et brésilien.

Sources :
Article de Jean Roy paru dans « L'Humanité » du 11 avril 2001 et notice biographique consacrée au réalisateur sur www.allocine.fr
Le grand Meaulnes, 1967
Dossier de presse du film


2006 — Jean-Daniel Verhaeghe

 
Réalisation : Jean-Daniel Verhaeghe
Scénario : Jean Cosmos et Jean-Daniel Verhaeghe
Avec : Nicolas Duvauchelle (Augustin Meaulnes), Jean-Baptiste Maunier (François Seurel), Philippe Torreton (M. Seurel), Clémence Poesy (Yvonne de Galais), Malik Zidi (Frantz de Galais), Jean-Pierre Marielle (M. de Galais), Emilie Dequenne (Valentine)...
Sortie : 4 octobre 2006


Le grand Meaulnes, 2006
Affiche française [ ? ] ; 120 x 160 cm


 
Près de quarante ans après l'adaptation de Jean-Daniel Albicocco, Jean-Daniel Verhaeghe transpose à l'écran le mythique roman d'Alain-Fournier. Le film est servi par une distribution prestigieuse, mais ne convainc pas. La critique est encore plus divisée qu'en 1966. Sur le site Internet du magazine « Télérama », les spectateurs sont plutôt amers :

« Encore une adaptation littéraire en grosse guimauve dégoulinante... Le contrat technique est rempli (c'est le minimum pour un tel budget), le scénario manque d'ambition pour approcher réellement l'œuvre originelle et, pour vendre, l'interprétation est comme maladroitement hétéroclite: des grands acteurs qui surjouent, des jeunes qui montent... »

« Une catastrophe. À oublier tout en conservant le livre, bien sûr ! »

« Vraiment décevant... Jean-Daniel Verhaeghe devrait rester dans son rôle de bon réalisateur de téléfilms pour le petit écran... »

Lire également la critique de Frédérick Lanoy





 
Jean-Daniel Verhaeghe
Réalisateur français, âgé de 62 ans au moment il tourne Le grand Meaulnes

Difficile de trouver des éléments biographiques sur Jean-Daniel Verhaeghe, si ce n'est qu'il a deux enfants : un garçon (Ferdinand) et une fille (Camille), qui ont parfois joué dans ses films.

Après deux longs métrages pour le cinéma, il se tourne vers la télévision et réalise de 1970 à 1979 une trentaine de documentaires, de magazines culturels, d’émissions pour la jeunesse, de directs. Il se consacre ensuite à la fiction, toujours pour la télévision.

Le tournage du Grand Meaulnes, commencé en 2005, marque le « retour » du réalisateur au cinéma. A noter que Jean-Daniel Verhaeghe a aussi été acteur (6 rôles entre 1969 et 1998) et producteur (2 séries TV en 1990).

De sa filmographie, on retient volontiers : Le clan Pasquier (2007), Galilée ou l'amour de Dieu (2005), Jaurès, naissance d'un géant (2005), Le Père Goriot (2004 ; il y a d'autres adaptations de Balzac avant celle-ci), Les Thibault (2003), La bataille d'Hernani (2002), Sans famille (2000), Bérénice (2000), Le rouge et le noir (1997), etc.


Le grand Meaulnes, 2006
Photos tirées du dossier de presse du film


   
Les chemins du Grand Meaulnes : causerie de Michel Baranger


  Nous vous invitons à visiter les pages des sites :

Fédération des maisons d'écrivains et des patrimoines littéraires
et
legrandmeaulnes.com


Un renseignement complémentaire, une correction :
info@legrandmeaulnes.ch